Semis Céréales : la parade se complique face aux accidents climatiques
Dates de semis et panel variétal répondent en partie seulement aux défis.
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Depuis plus de trente ans, les travaux d’Arvalis ont permis aux agriculteurs de choisir les dates de semis en fonction de l’optimum physiologique de chaque variété. Mais ces dernières années, les conseils calés sur la précocité n’ont pas toujours permis d’éviter les accidents climatiques. Les exemples récents sont nombreux : faible luminosité et pluie excessive en juin 2016 ; gel en avril 2017, suivi de pics de chaleur en juin ; excès de pluie à l’automne 2019, puis printemps 2020 trop sec, etc.
Diversifier ses choix
« La variabilité climatique qui s’accentue provoque des phénomènes, parfois de courte durée, mais très pénalisants pour les cultures, » déclare Jean-Charles Deswarte, ingénieur Arvalis, spécialisé en physiologie. Auparavant, la conjonction précocité variétale-date de semis permettait, dans un contexte régional donné, d’éviter les principaux écueils : gel hivernal avant endurcissement de la culture, gel à montaison (- 5 °C), stress hydrique et thermique pendant la phase de remplissage. « Aux accidents climatiques de courte durée viennent s’ajouter des contraintes agronomiques et réglementaires », poursuit le spécialiste. La multiplication des cas de résistance des graminées aux herbicides et le retrait des solutions insecticides – néonicotinoïdes – incitent parfois les agriculteurs à semer hors de la période optimale.
Les phénomènes climatiques soudains sont difficiles à prendre en compte au travers d’analyses fréquentielles. Décaler le semis pour éviter le gel en début de montaison ne permet pas d’esquiver un gel de - 3 à - 5 °C à la fin de celle-ci. « Ces deux dernières années, nos essais variétaux de blé en Champagne berrichonne de l’Indre ont montré la supériorité de variétés tardives comme Chevignon ou KWS Extase, note Édouard Baranger, ingénieur régional Arvalis à Bourges. Elles ont peu souffert du sec de mars et avril et bénéficié du retour des pluies en mai, puis d’un mois de juin sans coup de chaud. Pour autant, peut-on recommander ces variétés, alors que sur une longue période les précoces s’en sortent mieux ? Par ailleurs, avec le réchauffement climatique, le cycle des céréales s’accélère et des épiaisons plus précoces sont moins exposées à l’échaudage. »
Dans un contexte climatique aussi incertain, sans renoncer aux innovations, l’ingénieur plaide plutôt pour une diversification des choix en se basant sur les résultats pluriannuels, tout en listant les priorités de chaque parcelle. À titre d’exemple, un problème de désherbage ou une faible réserve utile peuvent inciter à reculer le semis et à opter pour une variété plus précoce à épiaison.
Outre l’importance du panel variétal, ces changements, sans doute durables, amènent à repenser les systèmes d’exploitation, alerte Jean-Charles Deswarte. « Dans les régions les plus concernées en raison du faible nombre de productions possibles, il faut entamer une réflexion sur l’intérêt de continuer à regrouper les cycles culturaux (colza-blé-orge) en les exposant aux mêmes aléas. En outre, faut-il encore viser le rendement maximum, ou accepter une baisse en limitant les risques sanitaires ? Il peut se passer plusieurs années avant que nous disposions d’outils de contrôle des ravageurs. »
Vincent Thècle
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